Anatomie d’un succès annoncé : Suicide Duck et RAD Savage Gear

Il est fort peu probable que vous ayez échappé au phénomène Suicide Duck. Mais quelle est la part réelle d’innovation de ces deux leurres ? Et quel est l’intérêt réel pour la pêche ? D’ailleurs, sont-ils égaux en terme de qualité ?

L’idée de faire un leurre en forme de caneton est venue à Mads Grosell en voyant une vidéo qui a fait le tour du monde sur la toile, où l’on voit un brochet attaquer un caneton. La voici :

Il en existe en réalité plusieurs, et il est vrai qu’il est connu que les brochets sont assez friands de jeunes volatiles aquatiques. Et ne parlons pas des silures avec les pigeons…

Cette donnée biologique entérinée — les carnassiers mangent des oiseaux — Mads a donc entrepris de réaliser son propre leurre caneton. Il n’avait alors peut-être pas prévu que Westin lui emboîterait le pas, et ce ne sont pas un, mais deux canetons qui virent le jour à peu près au même moment. Danny the Duck d’un côté, Suicide Duck de l’autre… hélas pour Westin, le suspens aura été de courte durée : le très sérieux, habituellement très diplomatique et prudent, site Luretour, n’a pas tardé à trancher en faveur de Savage Gear :

http://www.luretour.com/?p=2054

Il faut dire que Danny the Duck est un poisson-nageur nageant entre la surface et un mètre cinquante de profondeur, ni plus ni moins, là où le projet de Mads Grosell comprend une certaine cohérence avec l’imitation et un certain nombre d’innovations et d’atouts cruciaux pour la pêche.

capture-decran-2017-02-24-a-10-26-17Le Suicide Duck existe en deux tailles : 10,5 et 15cm, pesant respectivement 28 et 70g, déclinées toutes deux en trois coloris, l’un naturel, le second jaune (poussin on peut dire), le dernier enfin appelé « coot », c’est à dire foulque, donc noir. De notre point de vue, la petite taille est la meilleure. En France, elle déclenchera plus d’attaques, ce qui est quand même le but du jeu. C’est d’ailleurs l’une des raisons du succès : cela faisait longtemps que le marché du leurre, atone et écholalique, n’avait pas présenté une véritable originalité (qui séduit le pêcheur) ou un bon propbait (qui séduit les poissons). Avec le Suicide Duck, Savage Gear fait d’une pierre deux coups.

Le leurre se présente d’un seul tenant, on peut dire. On dirait franchement un jouet pour enfant. Vous pouvez le mettre dans la baignoire des gosses, ils ne trouveront rien à redire, même si d’ordinaire, les canards qu’on trouve dans les salles de bain des mères de famille françaises sont d’un tout autre usage….

La tête, le corps et les pattes sont solidaires et forment donc un bloc unique qui à première vue manque un peu de sophistication. Il est vrai qu’un teaser en plume a été installé sur les triples, mais cela ne suffit pas à donner un réalisme convaincant, même si le premier coup d’œil est flatteur, c’est vrai.

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C’est plutôt au niveau des détails que l’affaire commence à devenir très intéressante. Le Suicide Duck est un propbait. Ce sont les palmes qui sont chargées de buzzer en surface pour réaliser le mimétisme tant attendu. Et c’est vrai que quiconque a fait un jour s’enfuir un oisillon planqué sous la berge reconnaîtra ici le talent de Mads en matière d’inspiration naturaliste. C’est plutôt très réussi, puisqu’on retrouve ce mélange de vagues, de bulles et d’éclaboussures si caractéristiques du battement frénétique des ailes sur l’eau.

Autre point fort : l’armement. Les deux triples sont ingénieusement clipsés sur le corps du leurre. Ils restent donc en place, n’émettent aucun son métallique, sont discrètement enfouis dans leur plumage, et surtout, quand on retire le triple ventral, on obtient un véritable leurre weedless pour glisser sur les herbiers, les nénuphars, etc. Et là, le Suicide Duck prend tout son sens. Mieux encore profilé pour franchir certains obstacles affleurant qu’un buzzbait, il est aussi mieux armé qu’un grub monté texan. Enfin il est beaucoup, beaucoup plus agressif qu’un buzzing grub. Un dernier mot sur l’armement, quant à la qualité des anneaux brisés, à la fois solides et faciles à manipuler pour changer le triple si besoin. C’est dans le détail qu’on fait la différence.

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Il faut enfin ajouter que le leurre possède deux points d’attache : l’un juste au bout du bec, l’autre avec le triple ventral. Nouée sur le ventre, la ligne de flottaison annihile l’esbroufe de ses palmes rotatives — le leurre nage discrètement, glisse sur l’eau comme un petit oiseau qui se ferait tout petit… Voici d’ailleurs une astuce : utilisez une agrafe pour en un tour de main faire passer votre Suicide Duck d’une nage à l’autre, et ainsi alterner les actions de nage sur le même poste :

Comme vous pouvez le constater, malgré les premières réticences nous sommes tous petit à petit tombés sous le charme de ce qu’il faut bien appeler un nouveau jouet dans notre armada. Avec le Suicide Duck, nous sommes dans la partie la plus ludique de la pêche aux leurres. En sera-t-il de même avec le Rad ? C’est ce que nous verrons dans quelques jours.

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