Bigbaiting : l’enseignement du Troll (1/3)

067La pêche bigbait se popularise peu à peu. Encore confidentielle il y a cinq ans, elle fait aujourd’hui de plus en plus d’adeptes en France, pour des raisons que l’on peut analyser mais qui ne nous importent pas aujourd’hui. Non, ce qui nous préoccupe à l’inverse, ce sont les nombreux freins qui persistent — essentiellement psychologiques, mais pas seulement — et qui ne peuvent être neutralisés que par davantage de pédagogie, donc une argumentation crédible. C’est pourquoi je voudrais dans cet article m’appuyer sur l’expérience la plus paroxystique qui soit, celle de notre ami Dalien avec des leurres de près d’un kilogramme…

Pourquoi proposer d’envisager le bigbaiting par son bord le plus extrême ? Parce qu’il me semble qu’on a trop souvent tendance à vouloir amener les pêcheurs à changer leurs habitudes de manière graduelle, et que cette méthode laisse encore trop de place au doute : si je prends un brochet avec un leurre de quatorze centimètres, n’est-ce pas encore parce que cette taille est assez proche d’un autre de onze centimètres ? Il faut en conséquence affirmer avec force : NON, le volume d’un leurre, le volume d’eau qu’il déplace, est bel et bien souvent proportionnel aux espoirs que vous pouvez placer en lui.

En France, la pêche à la traîne est le plus souvent prohibée, et je ne peux pas dire que je sois contre. Ce n’est d’ailleurs pas le8 trolling en lui-même qui me gêne, mais l’état d’esprit de ceux qui sont le plus enclins à traîner, et qui sont souvent de parfaits prédateurs de la ressource. Mais laissons ce point de côté. Ce qui nous intéresse aujourd’hui, ce sont les possibilités offertes par la traîne aux pêcheurs étrangers, dont en particulier l’utilisation de leurres véritablement géants. Un swimbait de quarante centimètres comme celle que commercialise Savage Gear, pèse la bagatelle de sept-cent trente grammes. Autant dire qu’elle est inutilisable en lancer-ramener. Je ne connais en France qu’un seul duo de pêcheurs qui les lance et les mouline, et ce sont des physiques de bûcheron. Mais ils ont au moins compris l’intérêt de ces proies géantes — car ce n’est pas par pur plaisir masochistes qu’ils s’endolorissent les muscles, croyez-moi. Beaucoup plus nombreux toutefois sont ceux qui utilisent le modèle de trente centimètres — trente-cents grammes sur la balance — et quand aux modèles de vingt centimètres, ils sont aujourd’hui une référence reconnue par les pikers, puisque leur cent petits grammes à peine les rendent beaucoup plus facile à utiliser, même sur une journée entière.

Quels sont alors les résultats qu’obtiennent les « traînards » à l’étranger, avec la Line Thru Trout de quarante centimètres ? Je le dis tout de go : ils sont énormes, c’est le cas de le dire. Mais relativisons quand même dès à présent : la traîne permet de couvrir beaucoup d’eau en peu de temps. Toutefois, il serait très naïf de penser que c’est là la seule explication des bilans de pêche délirants qu’obtiennent ces pêcheurs avec ces bigbaits XXL, puisque ces pêcheurs ont toujours pratiqué la traîne avec des leurres moins volumineux, et toujours avec bien moins de résultat, toutes choses étant égales par ailleurs.

Un des tournants du bigbaiting en Europe a été l’introduction des caméras subaquatiques haute définition Water Wolf, qui a permis à bon nombre de pêcheurs d’observer ce qui se passait réellement derrière leur leurre. C’est ainsi qu’après avoir visionné des centaines d’heure d’images, Dalien en est venu à la conclusion que ce sont les leurres les plus gros qui attirent le plus de poissons… de toutes tailles.

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En fait, c’est la présence plus importante de ces leurres très volumineux qui semble provoquer le déplacement du carnassier de très loin. Pour le dire un peu abruptement, plus le leurre est gros, plus il agit à distance. De plus, tandis que les petits leurres suscitent un intérêt immédiat mais souvent immédiatement suivi d’un refus, les gros leurres engendrent des poissons suiveurs, parfois un long moment, et avec une bonne proportion d’attaques. Tout se passe comme si le carnassier était hypnotisé par la proie, et que ce long laps de temps d’observation se transformait fréquemment en séquence d’attaque. A cela on peut appuyer deux hypothèses : soit le prédateur se décide à attaquer parce qu’il s’est trop éloigné de son habitat, soit il se trouve comme contraint de ne pouvoir refuser une telle aubaine calorifique. Bien sûr, certains poissons se contentent de rester là, curieux, à nager derrière le leurre, mais cette curiosité ne semble suscitée que par les gros leurres. En fait, les carnassiers se trouvent exactement comme vous la première fois qu’on vous a présenté un bigbait : hébété.

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