Numa : Bonjour Amine, merci d’avoir accepté de réponde à mes questions. Où as-tu vu le jour et grandi ? Comment as-tu découvert la pêche ?
Amine Sébastien Kolatek : Bonjour Numa ! Je suis né à Rennes, capitale de la Bretagne ! J’ai grandi à Maurepas entre les tours et le terrain de football, où je passais la plus grande partie de mon temps après l’école. Diffèrent des autres enfants, j’avais toujours le désir d’être au contact de la nature et proche de l’eau. J’ai commencé à pêcher dans une petite marre, au coup et à la carpe, avec du très matériel rudimentaire… une bobine et un hameçon, quoi !
Numa : Comme je le disais dans l’article paru il y a deux jours, tu es à la fois parfaitement méconnu du grand public des pêcheurs, et une véritable star sur Youtube ! Mais toi-même, connais-tu bien la presse halieutique en général ? Lis-tu des magazines ?
ASK : « Star » est pour moi un mot trop fort, mais oui, clairement, sur YouTube les gens me reconnaissent et apprécient mon travail. Effectivement, avant l’émancipation des réseaux sociaux et l’explosion de la vidéo en ligne, je lisais les magazines de pêche tel que La Pêche et les Poissons, Predators… Là où la source de science pouvait être acquise facilement.
Numa : Comment expliques-tu la désaffection des pêcheurs pour les magazines ?
ASK : Peut-être est-ce dû à la nouvelle génération de pêcheur 2.0, qui préfèrent lire des articles sur le Net plutôt que sur un support papier. Et même apprendre directement en vidéo…
Numa : Nous avons en effet été vraiment surpris de constater que tu cumulais vingt milles abonnés sur ta chaîne ! Comment expliquer un tel engouement pour ces chaînes relativement amateurs, alors que d’autres projets extrêmement professionnels peinent à se faire une place ?
ASK : La « gratuité » et la qualité des vidéos proposées sur ma chaîne sont à la base de cette réussite. Mais aussi la proximité avec les abonnés, en répondant à toutes les questions posées, sur ma chaîne mais aussi ma page Facebook. Enfin, YouTube est une plateforme idéale pour l’apprentissage par la vidéo, c’est pour cela que les « tutoriels » de pêche sont la base de mon travail sur YouTube. Pour en revenir à Fishing TV, par exemple, c’est une chaine qui fait uniquement du live durant les salon de pêche, donc leur diffusion n’est pas assez régulière, contrairement à moi qui publie deux vidéos par semaine.
Numa : Comment les Internautes consomment-ils Youtube ? Est-ce un succédané de télévision ?
ASK : Je pense que les gens passent plus de temps sur Youtube que sur la télé, c’est un fait. Il y a tout ce qu’ils cherchent (conseil, humour, détente…), mais surtout, aujourd’hui presque tous les téléphones sont directement connectés à Internet.
Numa : Qui t’a inspiré dans ton travail ?
ASK : Au début, j’ai mis des vidéos de pêche juste pour le plaisir de partager mes sessions. D’ailleurs, elles n’étaient pas de très bonne qualité. Puis il y eut un précurseur de ce genre de vidéos sur YouTube, Aquabidule35 avec déjà huit milles abonnés quand j’ai commencé, et qui m’a fortement inspiré, ainsi que Feeling Fishing.
Numa : D’ailleurs, que penses-tu de la production d’autres acteurs du web, comme Stéphane Durand-Robin ? C’est un style très différent. Comment décrirais-tu ce que tu fais par rapport à Culture Fish ?
ASK : J’ai beaucoup aimé Culture Fish qui est un condensé de fun et de belles images. Maintenant, je pense que les gens veulent plus de tutoriels, par exemple sur les montages, les animations, jumelés avec des sessions purement pêche où ils voient des poissons. C’est ce qui fait la grosse différence entre le très bon travail de Stéphane et le mien.
Numa : Lorsque nous t’avons vu pour la première fois sur le salon de Clermont-Ferrand cette année, nous avons été extrêmement surpris sur le stand Effzett de mesurer que ta popularité auprès des adolescents dépassait de très loin celle de Ryusuke, par exemple ! Pas un jeune qui ne te connaisse, qui ne veuille te rencontrer ! T’attendais-tu toi-même à une telle estime ?
ASK : Surpris ! Voilà le mot qui résonnait dans ma tête le samedi soir après la deuxième journée du salon. Je ne pense pas que ma popularité dépasse celle de Ryu qui est une icône de la pêche moderne, mais clairement j’ai été « bombardé » de photos et de messages de félicitations (même des autographes !). Et sincèrement, cela m’a motivé encore plus pour faire des vidéos de qualités.
Numa : D’ailleurs, trahi par ta barbe qui trahit elle-même une double identité (entre hipster et fidèle), ton côté branchouille est contrebalancé par une foi chevillée au corps, qui — nous le supposons — t’invite à la fois à endosser la grande responsabilité de t’adresser aux autres, mais aussi à être extrêmement prudent quant au contenu de ces messages. Quelle est ton éthique de personnage public ?
ASK : Sincérité, objectivité et humilité. Voilà ma ligne de conduite. En ce qui concerne ma religion je n’en parle que très peu dans mes vidéos.
Numa : Mais tu es aussi un pêcheur comme les autres, avec des techniques préférées à d’autres…
ASK : Oui, on me surnomme souvent « Mister Popper ». J’aime particulièrement les pêches actives comme la pêche au topwater, mais aussi le streetfishing que je pratique très souvent.
Numa : Tu es un pêcheur urbain, un « streetfisher » disait-on avant qu’une firme ne décide de s’approprier ce joli mot de notre culture commune, mais cette revendication, cette fierté, est aussi toujours le nom d’un regret : quelles sont ces pêches et ces lieux qui te sont encore inaccessibles, et pour lesquelles ton imagination chavire ?
ASK : Toutes les pêches exotiques, la pêche en Amazonie par exemple. Pêcher le peacock bass au leurre de surface serait pour moi un rêve, qui crois-moi est partagé par plusieurs pêcheurs !
Numa : Mais revenons à ta chaîne. Sur quels logiciels travailles-tu tes vidéos ?
ASK : Je suis sur Sony Vegas Pro pour les montages vidéo, et Photoshop pour tout ce qui est retouche-photo et miniature Youtube.
P : Le rendement impressionnant de ta chaîne suppose une organisation sans faille. Quel est le temps réel nécessaire à dix minutes de vidéos, en comptant l’action de pêche, le montage, etc. ?
ASK : Je passe quasiment trente heures par semaine pour faire tout ça… Il est clair qu’il faut une organisation précise, mais il m’arrive parfois d’être juste au niveau de mes publications (en terme de timing et de régularité).
Numa : Comment sélectionnes-tu tes sujets ?
ASK : Je m’inspire souvent des réseaux sociaux, des demandes que je reçois via mon Facebook, et puis surtout en fonction de mes connaissances et de mes envies. J’ai une devise : je ne parle pas de choses que je ne maîtrise pas.
Numa : Travailles-tu seul ? Il semble que Fabien soit ton complice de toujours. Quel est son rôle ?
ASK : Je fais tout, tout seul. Fab’, c’est mon compagnon de pêche, ainsi que David et Teddy. Ils m’accompagnent et m’aident à avoir du contenu dans mes vidéos quand je ne prends pas de poissons, mais aussi passer de bons moments autour d’une partie de pêche.
Numa : Quels conseils donnerais-tu à un pêcheur qui souhaiterait se lancer ?
ASK : A ceux qui veulent débuter dans la vidéo, je conseille d’investir dans une petite caméra pas trop cher, et filmer en 720p et 30fps, ce qui suffit largement pour des vidéos sur Youtube. Il faut privilégier la qualité plutôt que la quantité, mais publiez régulièrement des vidéo (une par semaine est un bon rythme), et varier les sujets et les endroits de pêches afin de ne pas trop « spammer » les abonnés. Il faut autant que possible réaliser des vidéos innovantes, et animer ces vidéos avec une présentation et un petit texte à réciter au début de chaque vidéo. Surtout, soyez patients, beaucoup de nouveaux youtubeurs veulent avoir 10 000 abonnés rapidement, or cela prend beaucoup de temps c’est uniquement votre travail qui sera la clef de votre réussite sur Youtube. Mais surtout, il faut prendre du plaisir à se balader au bord de l’eau, à prendre du poisson et à s’éclater avec des amis lors de partie de pêche mémorables.
Numa : Merci Amine. Longue vie à ta chaîne et beaucoup de réussites dans tes projets. Nous aimons beaucoup ce que tu fais.